Sur le principe des mini-chroniques en pagaille de Light and Smell, voici mon retour sur mes dernières lectures hivernales, centrées sur le roman policier. Plus étoffées qu’un simple commentaire, moins élaborées qu’une vraie chronique, parce que je n’ai pas le temps ou l’envie d’écrire une vraie chronique pour chacun des livres…

Les sept morts d’Evelyn Hardcastle, Stuart Turton, éditions Sonatine (Roman policier/sf adulte)
Résumé : Ce soir à 11 heures, Evelyn Hardcastle va être assassinée. Qui, dans cette luxueuse demeure anglaise, a intérêt à la tuer ? Aiden Bishop a quelques heures pour trouver l’identité de l’assassin et empêcher le meurtre. Tant qu’il n’est pas parvenu à ses fins, il est condamné à revivre sans cesse la même journée. Celle de la mort d’Evelyn Hardcastle.
Mon avis : Un livre que j’avais vu passer de nombreuses fois sur les réseaux sociaux et dont j’avais peur que la lecture me déçoive. Au contraire, cela a été un véritable coup de coeur ! La construction de ce roman est démente et je n’aurais pas voulu être à la place de l’auteur pour tout remettre dans l’ordre de manière cohérente et lisible pour ses lecteurs. L’originalité de ce livre tient dans la manière dont l’histoire est racontée. Le héros, Aiden Bishop, va se retrouver dans le corps d’un invité présent à la fête où a lieu de meurtre d’Evelyn pour résoudre son meurtre. Mais lorsqu’il se réveille, il aura changé de corps, et ce, sept fois de suite. Le début est confus, tout comme Aiden qui se réveille dans le corps d’un médecin ayant subi une agression et ayant été confronté à celle d’une jeune femme du nom d’Anna. Peu à peu, il tente de retrouver ses esprits et va apprendre les règles du jeu grâce à un personnage énigmatique. Le second hôte, plus perspicace, va commencer à réfléchir sur la situation et se lancer dans l’enquête malgré un problème physique important. L’auteur, au fil des hôtes, va rendre difficile la progression de son personnage pour résoudre l’énigme d’Evelyn Hardcastle. La personnalité de chaque hôte va venir parasiter celle d’Aiden quand il occupera leur corps. Le héros va également découvrir qu’on le traque et que l’on cherche à le tuer à travers ses différents corps. Il trouvera une alliée en la fameuse Anna, mais l’est-elle vraiment ? Enfin, la famille Hardcastle, tout comme les différents invités de cette fête morbide, cacheront de nombreux secrets qu’il sera dangereux de découvrir. J’ai particulièrement apprécié les nombreux rebondissements présents dans l’intrigue, tant sur les corps que va occuper le héros, que sur Evelyn elle-même ou les différents secrets familiaux. L’auteur dépeint ici une aristocratie décadente, plus violente que ses domestiques et prête à tout pour conserver son statut social. Le fait de revivre la même journée mais d’un point de vue différent apporte un scénario très original qui ne laisse pas indifférent, et plutôt facile à suivre. Pour le côté voyage dans le temps, on se rendra vite compte qu’à cause de certaines lois « temporelles » des actions doivent avoir lieu pour éviter le fameux effet papillon qui rsique de briser l’équilibre et la dynamique de la journée. Et cela ne va pas aider notre héros ! Chose inattendue : l’auteur introduit des éléments de Science-fiction dans ce roman policier à multiples énigmes. Mais la touche reste légère et pas assez développée à mon goût. Il aurait été intéressant de s’y pencher davantage pour comprendre l’origine de ce jeu mortel et la société qui a conduit à sa création. En résumé, un véritable Page Turner avec de multiples énigmes dont vous ne sortirez pas indemnes.

Dix, Marine Carteron, éditions du Rouergue (Roman policier ado)
Résumé : Ils sont dix. Sept adolescents et trois adultes, sélectionnés pour participer à un escape game littéraire et passer à la télévision en prime time. Direction : un manoir sur une île coupée du reste du monde. Un endroit si isolé que personne ne vous entendra crier, gémir ou appeler à l’aide. Et quand la mort décide de frapper les candidats un par un, une seule question : qui est le coupable ? Un seul but : survivre !
Mon avis : Une réécriture efficace et trash du roman d’Agatha Christie Ils étaient dix, construite sur le même principe, mais avec des adolescents. Chaque personnage apporte son lot de secrets mais tous ont un lien en commun : le suicide d’une camarade de classe survenu un an plus tôt. Le jeu tourne rapidement au massacre au bout du deuxième jour avec des morts plutôt violentes et associées aux défauts de chacun : narcissisme, violeur, voyeur, cupidité, amour mortifère, jalousie… J’ai particulièrement apprécié les références aux contes de fées mises en scène dans ce manoir piégé de A à Z. En revanche, je ne m’attendais pas à trouver une telle concentration d’adolescents dangereux avec des thèmes assez forts : cyberharcèlement, viol, inceste, meurtre. Comme dans le roman original, le meurtrier est parmi eux mais s’en sortira-t-il lui aussi ? Un roman ado assez sombre qui se lit d’une traite, mais à ne pas laisser entre toutes les mains.

Les portes perdues, Les enfants indociles tome 1, Seanan McGuire, éditions Pygmalion (Novella fantastique young adult)
Résumé : Dans l’obscurité de leur chambre, sous leur lit, même derrière une armoire, les enfants descendent le terrier du lapin blanc et réapparaissent… ailleurs. Mais les pays imaginaires n’ont que faire de prodiges fatigués. Nancy y a fait un tour, puis elle en est revenue. Les choses qu’elle y a vécues l’ont changée à jamais. Les élèves qu’Eleanor West accueille au sein de son école le savent d’ailleurs très bien. Chacun d’entre eux doit se réadapter à ce monde et finit souvent par chercher un moyen de rejoindre le lieu de ses rêveries. Pourtant, dans cette institution qui existe pour les protéger, une ombre se cache derrière chaque pan de mur. Très vite, les meurtres s’enchaînent. Alors, pour survivre, Nancy et ses nouveaux camarades doivent trouver le coupable.
Mon avis : Une novella qui avait tout pour plaire, mais qui ne m’a pas convaincue malgré ses nombreux prix littéraires. On sent qu’il s’agit d’un tome introductif à d’autres tomes où pourtant le lecteur se voit peu expliquer l’univers. L’autrice préfère poser quelques éléments de son univers par touches sans expliquer en profondeur à quoi correspondent les royaumes dissimulées par les portes. Au lecteur d’imaginer s’il s’agit du royaume des fées, de celui des vampires, des squelettes, de Frankenstein ou encore d ‘Alice au pays des merveilles. Il s’agit ici de jouer avec les univers littéraires connus en les classant plus ou moins pour les faire correspondre à de grandes tendances. Les enfants seraient susceptibles de se promener dans ces univers quand la réalité semble trop difficile, mais seraient obligés de revenir par la suite dans la réalité. J’ai beaucoup apprécié l’idée générale qui m’a rappelée de nombreux livres sur l’échappée vers un monde imaginaire. Mais j’aurais aimé davantage de développement. Par ailleurs, côté personnages, le panel est étroit autour de Nancy avec des jumelles mi-vampires/mi-scientifiques, un garçon qui souhaite devenir une fille, une fille obsédée par le mouvement, une prof avec la maladie de Benjamin Button… Cela m’a rappelé un croisement entre Miss Pérégrine et les enfants particuliers et La famille Addams. Chacun est présent comme pour entamer une thérapie de sevrage et d’acceptation vis à vis des mondes imaginaires, ce qui pourrait être presque comique s’il n’y avait pas tous ces meurtres. Mais aucun sentiment de cohésion ne peut naître dans le groupe car chacun vient d’un univers différent et tous ont le secret espoir d’y retourner. Le déni des parents vis à vis des mondes imaginaires est assez incroyable : ils pensent que leur enfant a été kidnappé, ou a fait une fugue et est devenu fou. Le pensionnat reste la dernière chance pour ces derniers d’espérer une vie normale entre gens qui se comprennent. J’ai peu apprécié la partie policière que j’ai trouvé trop courte et très facile à résoudre. On sent que l’autrice préférait se concentrer sur l’introduction de son univers (quoique courte) plutôt que sur cette intrigue. En résumé : j’irai lire le deuxième tome, qui est visiblement une préquelle sur les jumelles par curiosité. Mais ce livre ne m’a pas enchantée outre-mesure.

Va au diable !, Sanguine, éditions du Chat Noir (Novella urban fantasy)
Résumé : Et si le Diable avait enjolivé ses pactes infernaux ? Un petit shop de tatouage dans une ville oubliée ne propose pas que d’innocents motifs ; on peut aussi y vendre son âme pour un peu d’encre. Littéralement. Dotée d’un talent exceptionnel et intermédiaire directe de Lucifer, Nessa crée des compositions uniques pour chaque client venu chercher son salut.
Mais ce travail implique bien plus que des horaires intenables et un mal de dos persistant ; l’âme de Nessa, tout autant menacée que celle de ses clients, voit son propre contrat passé avec son employeur infernal arriver à son terme et annoncer sa mort. Les pactes conclus avec Lucifer sont réputés inviolables… Son unique chance de s’en tirer consiste à réaliser l’impossible : arnaquer le Diable !
Mon avis : Une novella à l’humour noir et à l’ambiance gothique à savourer avec délectation. Tout se joue à huis-clos ou presque entre 3 personnages : Nessa, une tatoueuse au caractère bien trempé mais qui prend mal soin d’elle, Tess une sorcière moderne fan de plantes vertes et de poisons, et le Diable, fourbe et beau parleur qui décide des contrats entre les vivants et l’enfer. J’ai beaucoup apprécié les personnages de Tess et de Nessa qui sont totalement opposés au niveau de leur caractère et aussi au niveau vestimentaire. Si Tess adore les dentelles et pourrait passer pour une poupée lolita, Nessa se rapproche plutôt de la pure gothique avec son total look noir et ses doc martens. Si Tess est douce et chaleureuse, Nessa est froide et cassante avec une jolie répartie. Leur romance lesbienne, peu développée passe au second plan face à l’idée fixe de Tess de prolonger son contrat diabolique (sinon elle meurt !). J’ai aimé le dévoilement progressif de la manière dont Tess tatoue les pactes de ses victimes. Tout est pensé avec cohérence dans un univers où ce type de salon pourrait exister. On en apprend aussi beaucoup sur le tatouage en général. L’autrice sait doser ses effets et le suspense assez habilement, notamment avec la présence permanente du chat de Lucifer, Dandy, qui espionne Nessa pour le compte du diable. Le matou rend la tâche difficile à Nessa qui va devoir agir en douce. Je regrette seulement une facilité sur le dénouement : je m’attendais à cette chute. Mais j’ai adoré l’ambiance de cette nouvelle et je serais curieuse de lire d’autres histoires de l’autrice. En bref, une novella gothique infernale où l’encre se mêle à la fourberie. A se faire tatouer sans modération.

The corpse queen, Heather M; Hermann, éditions Fibs (Roman Policier historique Young Adult)
Résumé : Alors que sa meilleure amie Kitty vient de mourir dans des circonstances mystérieuses, Molly Green, orpheline de dix-sept ans, découvre l’existence d’une mystérieuse tante. Richissime, Ava est disposée à prendre la jeune fille sous son aile… à condition que celle-ci soit prête à en payer le prix. Car Ava a bâti sa fortune en pillant des tombes pour revendre les dépouilles à des étudiants en médecine avides d’apprendre la chirurgie. Et elle veut que Molly l’aide à se procurer les corps. Or à Philadelphie dans les années 1850, une jeune fille non mariée n’a que peu de perspectives. De plus, Molly est bien décidée à remonter la trace de l’étudiant qu’elle pense être l’assassin de Kitty. Elle accepte donc et découvre son nouveau métier… mais surtout, les leçons d’anatomie du docteur LaSalle, qui vont la fasciner. Mais à cette époque, aucune femme n’est censée étudier pour devenir chirurgienne. Et alors qu’un meurtrier sévit en ville et que la mort de Kitty reste impunie, la poursuite du savoir devient pour Molly une danse… mortelle.
Mon avis : Un thriller historique haletant avec une bonne dose de féminisme. Un autre de mes coups de coeur de l’année. Ce roman aborde l’histoire de la médecine, l’ouverture difficile aux femmes du savoir médical, le commerce des corps pour exercer, et en parallèle une intrigue policière sur des meurtres de prostituées. L’héroïne est une vraie tête brûlée à qui on aurait envie de coller des claques. Je n’ai clairement pas apprécié ce personnage constamment en révolte. En revanche, j’ai adoré découvrir avec elle les rouages cachés du commerce des corps et mener l’enquête sur les meurtres qui secouent Londres. De nombreux rebondissements sont présents dans ce récit, associés au passé des personnages : qui est vraiment la tante de Molly ? Comment est-elle devenue riche et respectée (ou du moins crainte) ? Quel lourd secret cache l’assistant de sa tante (malgré les sentiments de Molly pour ce jeune homme) ? L’assassin est-il celui que l’on croit ? Derrière ces questions, l’autrice nous entraîne dans le commerce des corps qui n’est pas aussi réjouissant que l’on peut croire : Molly devra mentir, faire preuve de courage et de force pour récupérer des cadavres utilisés par les étudiants en médecine. Mais elle découvrira aussi une confrérie qui respecte les corps des défunts même s’il s’agit de leur gagne-pain. A l’inverse, elle fera la connaissance d’individus peu scrupuleux pour récupérer des trophées ou particularités anatomiques comme le voleur de dents. Ou elle deviendra amie avec des danseuses/prostituées de cabaret, découvrant la vie nocturne de Londres et une forme d’émancipation. Sa volonté d’apprendre la médecine sera une autre forme de liberté, mais difficile à atteindre tant elle est intelligente et jalousée par ses camarades sexistes. Le roman nous met en avant la difficile condition des femmes seules sans fortune dans ce Londres du 19e siècle, où le choix se réduit au travail chez les soeurs ou à la prostitution. Un roman policier historique teinté de romance que j’ai adoré lire cet automne, et dont la saison froide correspond tout à fait à l’ambiance.
Certaines de ces lectures proviennent de ma pal d’automne de septembre, mais que j’ai lues entre janvier et février.
N’hésite pas à aller jeter un oeil si tu cherches d’autres lectures de ce style.
Mimosa et thé à la vanille,
A.Chatterton
Va au diable m’avait bien plu aussi ! 🙂
je note ton retour sur The Corpse Queen pour une future lecture automnale !
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Je l’ai lu en automne et c’était top ! Je n’ai pas eu l’occasion d’en reparler avant cet article 🤣
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