La princesse sans visage, Les Royaumes immobiles tome 1, Ariel Holzl, éditions Slalom

Quel plaisir de retrouver la plume d’Ariel Holzl dans un univers toujours aussi sombre mais qui nous emmène cette fois-ci du côté de fées très cruelles (ou plutôt des feys) et d’une jeune fille confrontée à un destin non choisi. Une lecture parfaite pour la saison, issue de ma Pal automnale de Septembre...

Résumé : Dans les Royaumes Immobiles, l’existence est contrôlée par quatre monarques. Sans eux, la réalité serait réduite à un flot d’énergie magique et chaotique. Or le trône d’Automne, vacant depuis trop longtemps, menace cet équilibre : il faut lancer un nouveau sacre. Sept jeunes femmes peuvent y prétendre. La compétition sera sans pitié. Ivy est candidate malgré elle. À 18 ans elle a passé toute son existence cachée derrière les murs de son manoir et les parois de son masque. Elle est une  » Belle-à-mourir  » : quiconque voit son visage est pris de folie meurtrière ou suicidaire. Propulsée dans le monde des Sidhes, la noblesse des feys, au cœur de manigances qui la dépassent, elle va devoir puiser dans ses ressources pour survivre. Un chemin qui la mènera bien plus loin qu’elle ne l’aurait imaginé…

Mon avis :

Un univers foisonnant

L’auteur change un peu de registre dans ce roman en nous proposant un univers plus fantastique que gothique, voire de fantasy. Les Royaumes immobiles se découpent en quatre grands royaumes liés aux saisons, avec à sa tête quatre monarques qui régissent l’équilibre de l’énergie magique de l’ensemble de l’univers. Chacune est une feys (=fée) à sa manière et selon une mythologie différente, montrant la multiplicité des inspirations d’Ariel Holzl.

Ainsi Titania, la reine de l’été est celle évoquée par Shakespeare dans Le Songe d’une nuit d’été. Même Obéron est cité et Puck présent à sa cour pour manigancer dans son dos. Elle apparaît comme une reine hautaine, glaciale et intraitable. Ses sujets, les leanans Sidhes, sont des êtres issus de la mythologie celtique et popularisés par Shakespeare. Ils portent des vêtements aux tons chaleureux et peuvent absorber l’énergie vitale des autres comme des vampires.

La Reine de l’hiver, Mab, vit dans un palais de glace et a plongé tout son royaume dans un gel éternel. Elle règne sur les elfes qui sont plutôt du genre combattif et inspirés de la mythologie nordique, voire viking.

Oona, la Reine du printemps, peut-être la plus retorse de toutes, mutile ses sujets les sylphes pour se créer des parures avec des morceaux de leur corps. C’est également un moyen pour elle de garder le contrôle sur eux. Son univers est verdoyant et parsemé de sève. Ses habitants sont d’une beauté effrayante malgré les mutilations.

Ivy, l’héroïne vient du Royaume d’Automne. C’est une beansidhe, un être issu de la mythologie celtique qui peut s’apparenter aux banshees selon les versions. C’est une Sidhe différente de celles de l’été. Son royaume comprend aussi des Boglings (créatures aux multiples formes, mais surtout animales, inspirées de Star Wars) dont des Cat Sidhe : des créatures mi-chat mi-humain aux pouvoirs magiques.

Chacune des reines maîtrise le Bel Art, qui est une autre manière d’appeler la magie. C’est un don qui s’apprivoise et se travaille, et qui reste difficilement maîtrisable. La seule chose qui puisse nuire à tout être féérique reste le métal car il provient du royaume des humains.

Au fil de l’histoire, on comprend que Les Royaumes immobiles sont situés dans un univers parallèle à celui des humains, appelés les « rêveurs ». Certains se sont aventurés dans les Royaumes immobiles et sont devenus malgré eux des membres de la cour des trois reines. Ils sont leurs musiciens, leurs passeurs d’un monde à l’autre mais ont l’aspect de coquilles vides.

Il existe aussi des aventuriers à moitié humains, envoyés dans les quatre royaumes pour combattre les stigmates de la guerre : des créatures gigantesques créées par le Roi Gris qui ravagent tout sur leur passage. Leur création est un mystère ainsi que celle des aventuriers.

L’héroïne qui vivait recluse dans son manoir depuis son enfance va découvrir à la fois les autres royaumes lors de la compétition, mais aussi le Royaume des rêveurs, autrement dit, notre réalité.

Une intrigue politique aux multiples rebondissements

Dans ce premier tome, l’auteur nous plonge dès le départ dans un complot politique : Puck vient chercher Ivy pour qu’elle concoure au trône d’Automne. On ne connaît pas ses motivations, mais on se doute qu’elles ne sont pas sincères car le personnage est connu pour être quelqu’un de retors. Ivy qui vivait recluse dans son château et seule depuis le départ de son père à la guerre se voit imposer cette compétition malgré elle.

La venue d’Ivy déplaît ensuite aux trois reines car elle apparaît comme la candidate qu’elles ne souhaitaient pas avoir alors qu’il s’agit de la plus légitime : même bâtarde du Roi Gris, elle reste sa fille et la plus désignée à régner sur le Royaume d’Automne par le droit du sang.

Les autres prétendantes au trône ne lui feront pas de cadeaux pendant la compétition qui s’avèrera rude : chaque épreuve est censée mettre en avant une des qualités nécessaire pour gouverner mais peut aussi les tuer.

Chacune a également prêté serment magiquement afin de mener à bien cette compétition dans les règles imposées par les reines et est susceptible de mourir si cela n’est pas respecté.

Enfin, Ivy part déjà avec un handicap : elle a été maudite depuis son enfance par la Reine Titania pour des raisons mystérieuses. De ce fait, elle doit porter un masque en permanence car quiconque voit son visage peut mourir de folie. Et Titania ne lui fait pas de cadeaux durant la compétition.

Les alliances que l’héroïne pourra nouer seront parfois à double tranchant et elle découvrira au fur et à mesure de la compétition que tout n’est pas rose pour les sujets de chaque royaume visité : les petits peuples sont méprisés au profit des « espèces » supérieures mises en avant par les reines. La fille de la reine Titania s’avère aussi cruelle et folle que sa mère qui l’empêche de régner et l’infantilise. Les fils de Mab sont tout aussi retors les uns que les autres au lieu d’assumer dignement leur fonction de prince. Les trois reines sont obligées de se supporter pour la paix du royaume mais se détestent fortement.

Ce premier tome se termine sur un chapitre digne d’un thriller où un rebondissement va tout remettre en question pour l’héroïne et le reste des autres royaumes. Un rebondissement savamment orchestré par l’auteur qu’il était presque impossible à prévoir tant le point de vue de l’héroïne est dominant pour nous rapporter son histoire.

J’ai pu lire de nombreuses critiques sur ce livre indiquant que l’auteur ne renouvelait pas le genre du « Young adult mettant en compétition des jeunes filles pour un trône ou une récompense ». J’avoue avoir peu lu de romans de ce type. Cependant, je trouve que la force de ce récit est de proposer un univers riche et des intrigues politiques complexes au genre « roman de compétition ». De ce fait, ce n’est pas un banal « roman de compétition » comme on pourrait le penser.

Ivy, une héroïne malgré elle

Ivy part avec deux handicap dans la vie : elle est la fille bâtarde d’un roi disparu et porteuse d’une malédiction qui l’empêche de montrer son visage. C’est donc une jeune fille assez timide qui a appris à se débrouiller seule depuis le départ de son père et de l’ensemble des domestiques de son château. Elle n’a jamais voulu embrasser sa vie de princesse même si elle a été élevée en ce sens.

Autre particularité sur ses origines : au lieu d’avoir les oreilles pointues comme les autres Sidhes, les siennes sont rondes comme celles des humains. Cela laisse planer le doute sur l’identité de l’un de ses parents dès le début du récit.

La compétition pour le trône va obliger la jeune fille à concourir pour sa vie : à l’inverse des autres participantes, elle ne possède plus rien et risque la mort si elle perd. Car la bâtarde d’un roi mort et sans ressources reste un danger pour la succession du trône d’Automne… Ivy ne participe pas pour le trône mais pour rester en vie.

La jeune fille va devoir apprendre à faire preuve d’ingéniosité, à créer des alliances insolites, à se protéger de tentatives de meurtre, à maîtriser la magie lors de cette compétition. Cela va la faire grandir et évoluer afin de devenir une vraie princesse.

Elle prendra également conscience des défauts du règne des trois reines en place et à se soucier du petit peuple, elle qui a vécu depuis l’enfance sans préjugés. Une qualité qui se transformera vite en défaut aux yeux des autres…

Enfin, son rapport au monde des humains sera aiguisé par sa rencontre avec un aventurier mais aussi une incursion dans le royaume des rêveurs. On sent une grande curiosité mais aussi l’envie de les considérer autrement que comme des sujets malléables à loisir par la Cour.

J’ai particulièrement apprécié la relation étrange qu’elle noue avec la fille de Titania : la Princesse de la Lune s’avère un personnage particulièrement cruel qui obéit à une logique propre et totalement atroce. Une vraie psychopathe comme sait si bien les décrire l’auteur.

En résumé : Ariel Holzl signe ici un premier tome riche en rebondissements politiques avec une héroïne timide qui prendra son envol au fil de l’histoire. Une compétition haletante pour le pouvoir ou la survie, dans un univers foisonnant et inspiré de plusieurs mythologies. J’ai hâte de lire la suite !

Ce livre fait partie de ma pal d’automne 2022 pour le mois de septembre. N’hésite pas à aller jeter un oeil sur mon article de PAL pour avoir des idées de lecture automnales !

5 réflexions sur « La princesse sans visage, Les Royaumes immobiles tome 1, Ariel Holzl, éditions Slalom »

  1. Comme toi j’ai vraiment hâte de lire la suite de ce roman ! J’ai été très agréablement surprise par ce roman, depuis les sœurs Carmines et bpocalypse je trouvais que l’auteur se perdait un peu et là j’ai retrouvé tout ce que j’aime chez lui.

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  2. Vu ce que tu en dis, il va falloir que j’y jette un oeil ! Merci pour ta chronique !

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