Villa Anima, Mathilde Maras, éditions Gulf Stream

Dans une société patriarcale où les femmes sont écartées du pouvoir, une seule option s’offrent à elles pour gagner un statut social : la Villa Anima. Magda saura-t-elle en déjouer les pièges pour changer son destin ? C’est l’intrigue que vous propose ce thriller au suspense incroyable…

Résumé : Dans l’empire de la Main, les filles n’ont d’autres choix que de se taire et de baisser la tête. Rares sont celles qui osent défier l’autorité en passant les rituels de la mythique Villa Anima. Magdalène sera de celles-ci ! Lorsque les portes du manoir se referment derrière elle, Magda a le sentiment d’être engloutie par un monstre. Pourtant, elle doit jouer le jeu si elle veut atteindre son objectif : gagner la première épreuve de l’Esprit, celle de l’écharpe verte. Un simple morceau de soie qui lui octroierait un statut dans la société, et le droit de mettre un terme à sa grossesse. Alors que la jeune fille se prépare et s’interroge sur la nature du défi à relever, elle assiste à des phénomènes si étranges qu’elle se demande si son esprit ne lui joue pas des tours. À moins que quelqu’un souhaite la détourner de son projet… Du haut de ses seize ans, Magda saura-t-elle surmonter tous les dangers de la Villa Anima ?

Mon avis :

Entre l’Antiquité et La Servante écarlate

L’univers créé par Mathilde Maras apparaît dès le départ comme une société patriarcale où certains ont des droits acquis par la naissance et pas d’autres, et où surtout les femmes sont inférieures à tout point de vues.

J’ai trouvé qu’il s’inspirait un peu de l’Antiquité grecque avec les citoyens mâles qui ont le droit de vote, transmis de génération en génération, à l’inverse des esclaves ou des étrangers. Et où les femmes sont destinées à enfanter et à réaliser des alliances politiques ou commerciales, même quand elles étaient issues de familles avec un haut statut social.

On retrouve un peu cet esprit par le discours de nombreux personnages masculins de pouvoir dans l’histoire de la Villa Anima, qui considèrent les femmes comme des reproductrices et dépendantes de leurs émotions… donc difficilement capables de gouverner.

Ajouté à cette organisation, un élément fantastique est mis en place : L’Esprit, sorte de pouvoir résidant en chacun mais qui se manifeste de manière différente, et relève surtout de la légende.

Au fil du temps, on comprend que ceux qui osent défier la Villa Anima pour changer leur condition sociale sont assez peu nombreux et plus rares encore, ceux qui briguent une écharpe orange ou bleue (les niveaux des dirigeants). La Villa inspire la crainte et il n’est possible de se plier aux épreuves qu’une fois dans sa vie. Si vous gagnez l’écharpe verte (le premier niveau), et que vous souhaitez briguer un niveau supérieur, vous devrez remettre en jeu ce qui a été acquis, au risque de tout perdre.

Partant de ces conditions peu favorables, l’héroïne Magdalène, décide de prendre son destin en main car elle n’a pas le choix. Enceinte à 16 ans sans possibilité d’avorter car née dans une famille sans écharpe (= statut social), et qui plus est étrangère, elle est destinée à un sombre destin. C’est ce leitmotiv qui la guidera au départ, avant d’être motivée par le besoin de défier le maître de cérémonie responsable des épreuves, et surtout très misogyne.

En défiant le système, elle va peu à peu mettre le doigt sur des incohérences en lien avec le pouvoir en place et surtout des secrets associés à l’empereur. Un vrai grain de sable dans un engrenage bien huilé !

L’auteure évoque également la transition politique et religieuse qui s’est opérée dans l’univers en passant d’une ancienne religion à une nouvelle plus oppressante pour les femmes. Ce qui a eu pour conséquences d’éroder un système pourtant équitable au départ par des hommes soucieux de conserver leurs privilèges. Elle glisse également quelques thèmes dans l’air du temps : références LGBTQIA+, condamnation du viol, mise en avant de l’avortement quand les conditions ne sont pas favorables et surtout l’idée que les femmes ont tout autant à apporter dans la société que les hommes.

Un thriller oppressant et plein de suspense

Au fil des pages, l’auteure instille une sensation d’enfermement dont on ne sort qu’au tout dernier chapitre. Magda est vraiment entrée dans la gueule du loup !

Magda arrive dans la Villa dans un carrosse qui ressemble à un ventre maternel mortifère dont on s’éveille après un long cauchemar. La couleur rouge, celle de l’Empereur et du sang, guidera par ailleurs, l’ensemble du récit.

La Villa Anima apparaît comme douée de vie, une sorte d’animal qui se défend des étrangers venus passer les épreuves dans ses murs. L’héroïne devra se protéger en dehors des épreuves organisées, juste en allant réclamer ses droits auprès du maître de cérémonie ou en se promenant dans les couloirs.

Les épreuves génèrent un suspense incroyable : on ne sait jamais à quoi s’attendre ni comment l’héroïne va en venir à bout (ou si elle va en venir à bout) ! Car elles nécessitent plusieurs caractéristiques : force, intelligence, rapidité, sens du sacrifice, mépris des règles … Magda va devenir malgré elle un symbole d’espoir pour toutes les femmes de son univers, ce qui ne sera pas sans heurts…

Quelques rebondissements finaux mettront en lumière la vérité sur les épreuves de la Villa Anima, ainsi que sur les précédents participants et le maître de cérémonie. Un des rebondissements au sujet d’un personnage était vraiment inattendu et je ne l’avais pas du tout deviné ! Preuve que l’auteure a su nous conserver des surprises jusqu’à la fin, avec une touche d’horreur bien sentie.

Quelques bémols

Si j’ai beaucoup apprécié l’univers et l’intrigue en général, j’ai eu l’impression par moment que le récit manquait de fluidité : les passages décrivant l’univers, entre deux épreuves réalisées par l’héroïne, n’étaient pas très subtils. Ils étaient utiles pour comprendre le récit, mais auraient peut-être été plus intéressants à développer en les découvrant à travers les yeux d’un personnage ou en lien avec une sous-intrigue. Je serais très intéressée de découvrir une préquelle sur la construction de cette société, avec un autre personnage.

Par ailleurs, j’ai trouvé dommage que la quatrième de couverture dévoile autant le récit car je me suis ennuyée sur les deux premiers chapitres qui développaient finalement le résumé.

Je m’attendais aussi à ce que Magda réalise l’épreuve avec plus de participants, comme la première de couverture le laissait entendre, à la manière de Hunger Games. Or, ce n’est pas le cas : une seule autre participante réalise l’épreuve en même temps que l’héroïne, et encore, c’est chacune leur tour.

Enfin, j’avais deviné la fin du livre, malgré les rebondissements. J’aurais préféré que l’histoire se termine autrement, juste pour changer un peu des histoires habituelles. Mais ce n’est que le ressenti d’une lectrice habituée à ce genre d’histoires.

En résumé : Malgré les petits bémols évoqués, j’ai passé un bon moment de lecture avec Magda dans cette Villa Anima remplie de dangers. J’en garde le souvenir d’une histoire portée sur des valeurs d’ouverture, de féminisme et d’égalité, ainsi que de dépassement de soi. Un beau message à envoyer à toutes les femmes du monde.

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