Sur le principe des mini-chroniques en pagaille de Light and Smell, voici mon retour sur mes dernières lectures pour le Hanami Book Challenge. Plus étoffées qu’un simple commentaire, moins élaborées qu’une vraie chronique, parce que je n’ai pas le temps ou l’envie d’écrire une vraie chronique pour chacun des livres lus…
La pêche au Toc dans le Tôhoku, Shinsuke Numata, éditions Picquier
Menu Japon contemporain – catégorie Fly me to Saitama

Résumé : Imano a la trentaine, lui qui ne connaît que la capitale a été muté dans une région de rivières et de forêts où il se sent un étranger. Mais voilà qu’une simple occupation pour meubler son temps libre prend de plus en plus de place dans sa vie. La pêche. Remonter un torrent dans la pénombre de la végétation dense, appâter avec quelques oeufs de saumon, d’un balancement précis du poignet poser la ligne juste là où il faut dans un trou sur l’autre rive. Et même si l’on prend plus facilement des vandoises communes que les savoureuses truites yamame, quel plaisir de pêcher en compagnie d’un ami toujours prêt à ouvrir une bouteille de saké ! Mais comment avoir un ami masculin sans que l’attirance vienne brouiller les plaisirs les plus simples ?
C’est une histoire de pêche et d’amitié dans une nature pailletée de lumière et d’ombre, traversée en sourdine par la difficulté d’être au monde quand on se sent différent des autres. Ce premier roman impressionniste et désenchanté a obtenu le prix Akutagawa, le Goncourt japonais.
Mon avis : Ce court roman est présenté dans son résumé comme un livre portant sur l’homosexualité et la campagne japonaise.
On y retrouve bien de très belles descriptions de la nature et de la pêche dans cette région très rurale, ce qui a certainement valu son prix à l’auteur. J’ai beaucoup apprécié l’endroit, même si pour le personnage principal, il tranche beaucoup avec la vie effrénée citadine de Tokyo, avant qu’il ne s’habitue au calme et la sérénité bucolique du Tôhoku. On ressent sa solitude dans cette région qu’il connaît peu et sa difficulté à se faire des amis qui allient ses deux passions : pêche et saké. Il semblerait d’ailleurs que cette mutation soit un rite de passage pour l’entreprise avant de réintégrer la filiale de la capitale.
Sa rencontre avec Hiasa va lui donner envie de rester car il se découvre un ami un peu fantasque avec les mêmes centres d’intérêt. Quand ce dernier quitte l’entreprise pour un nouveau travail de représentant, Imano va le trouver changé, comme s’il essayait d’épater tout le monde et leur amitié va en pâtir. On peut y voir un inversion des rôles : Hiasa devient ambitieux dans son travail, à l’inverse de Imano qui n’aspire qu’à une vie tranquille et ne souhaite pas revenir à Tokyo. Mais qui est vraiment Hiasa ? C’est ce qu’Imano va tenter de découvrir.En filigramme, l’auteur fait référence au Tsunami de Kamaishi en 2011 dans la région qui secoue pas mal les habitants et précipite la fin du roman.
Je pense être passée totalement à côté du thème de l’homosexualité dans ce roman. Est-ce dû à la différence culturelle ? Est-ce sous-entendu ? Hiasa semble un être étrange que son père ne porte pas dans son coeur, mais est-ce parce qu’il serait peut-être gay ? Je n’ai pas tout compris, d’autant qu’Imano n’a a aucun moment des idées romantiques ou érotiques vis à vis de Hiasa. Il éprouve une amitié profonde renforcée par sa solitude de citadin aux hobby particuliers dans une région très rurale. Pour résumer, cette lecture reste pour moi un peu incompréhensible, peut-être à cause de sens cachés que je n’ai pas su décrypter, mais elle n’a pas été pour autant déplaisante.
Maïmaï, Aki Shimazaki, éditions Actes Sud
Menu Au temps des traditions – catégorie le sourire de la Geisha

Résumé : La mort subite de la séduisante Mitsuko prend tout le monde par surprise, y compris les clients de sa librairie. Alors que des visiteurs se présentent pour rendre un dernier hommage à sa mère, Tarô, son fils sourd et muet, est préoccupé par certains détails de son histoire familiale. Mais qu’importe. Il est charmé par la beauté naturelle d’une jeune femme venue lui présenter ses condoléances. Tous deux éprouvent rapidement des sentiments si vifs qu’ils désirent s’épouser. Ce bonheur semble complet, rien ne pourrait le compromettre.
Mon avis : Ce court roman est la suite directe du roman Hozuki du même auteur, évoqué dans mon précédent article de mini-chroniques spécial challenge. Il fait partie d’une série de 5 romans ayant pour nom L’ombre du chardon, mettant en scène les mêmes personnages qui se croisent.
Nous retrouvons Tarô, vingt ans après Hozuki, qui doit réaliser la succession de sa mère, décédée subitement. Devenu mannequin et peintre, il décide d’ouvrir sa galerie à la place de la librairie de sa mère. Côté coeur, il peine à trouver chaussure à son pied du fait de son handicap et qu’il ne soit pas japonais pur souche (=il est métis espagnol). Sa rencontre avec Hanako, une amie d’enfance va tout changer et lui redonner espoir et amour. Malheureusement, les secrets de Mitsuko et de sa grand-mère vont peu à peu ternir l’histoire d’amour de Tarô et sa vie tout entière.
Avec ce deuxième opus, l’auteure nous met en garde contre les secrets de famille et des conséquences de les cacher, par amour pour ses enfants. Au fil des pages, tout tourne peu à peu au drame, malgré les efforts du personnage principal pour s’en sortir dans sa vie, mais il ne peut rien y faire. On y retrouve également des réflexions sur la vie des femmes japonaises : d’un côté Mitsuko indépendante, élevant seule son enfant et prenant soin de sa mère, refusant le mariage et devenant entraîneuse un soir par semaine pour l’argent et par intérêt intellectuel. De l’autre la mère d’Hanako, femme de diplomate et femme potiche, trompée par son mari, consultant un psychiatre, empêchée de divorcer pour sauver les apparences, sombrant peu à peu dans la folie. Ici, les femmes ne doivent pas entacher leur morale sous réserve de trouver un bon parti, le mariage étant la seule voie honorable. Seule Hanako, de la jeune génération s’efforce de ne pas prendre en compte l’avis de ses parents et de se marier comme elle l’entend.
L’auteure évoque aussi le racisme et la discrimination ordinaire dont est victime Tarô du fait de son infirmité et de ses origines. On lui demande souvent de quel pays il vient, alors qu’il est japonais. Et son handicap effraie parfois les gens, alors qu’il s’efforce de rester digne en toutes circonstances. On sent également que le fait de se marier est une pression sociétale assez forte et ancrée dans la culture japonaise et que trouver un bon parti n’est pas facile, même pour les jeunes hommes, obligés de démontrer aux beaux-parents qu’ils sont des gens sérieux et pourront entretenir leur femme.
Ce petit roman est court mais très fort en émotions et en thèmes intéressants concernant la culture japonaise. Par contre, il n’est pas très joyeux et on sent venir le dénouement assez rapidement. Il peut se lire de manière indépendante, mais si vous n’avez pas lu Hozuki, vous découvrirez les secrets de Mitsuko en même temps que son fils. Je pense lire les autres tomes de la série, même si je m’attends à nouveau à des drames…
Touiller le miso, Florent Chavouet, éditions Picquier
Menu Japon contemporain – Catégorie Tokyo by night

Résumé : Au Japon, Florent est autant dessinateur que poète. Toujours prêt à nous surprendre. Il est sensible à l’inattendu et goûte avec gourmandise un simple rien pris sur le vif. Il vole des pierres dans un jardin, considère un compteur électrique et une fenêtre à contre jour, caresse un petit chien qui boit, encourage un filet de maquereau…
Ce qu’il aime, ce sont des instants de vie fugaces ; et ce qu’il préfère, c’est donner vie à une étiquette de fruit ou une carte de géographie. Ces petites choses ordinaires et souvent incongrues qui nous émeuvent le temps d’un regard sont pour lui autant de détails révélateurs qu’il sait amplifier au point de pouvoir tirer parti de l’éternité d’un kaki. Tout est déjà là, il faut simplement le voir.
Mon avis : Ce livre se situe entre le roman graphique et le récit de voyage, mais un voyage particulier car l’auteur nous fait visiter plusieurs bars à saké/ supérettes d’alcool japonais : les Kaku Uchi. Le périple se découpe en plusieurs étapes : à chaque fois, Florent Chavouet nous raconte en dessin des anecdotes associées au Kaku Uchi visité, où il se situe avec une carte de son cru, quelques éléments du quotidien dans le même quartier (fenêtres vues de nuit, publicités détournées, panneaux de signalisation, bâtiments…) agrémentés d’un haïku souvent humoristique.
Le dessin prend plusieurs formes : photographie au crayon de couleur ultra-réaliste de bâtiments, fenêtres vues de nuit ou de nourriture ; caricature de personnes avec un trait très simple, carte ultra-détaillée et personnelle sous forme de petits carrés, paysages urbains ou ruraux façon panorama. L’ambiance est franchement nocturne et pleine de poésie.
La cartographie des Kaku Uchi est très instructive avec des détails sur les procédés de fabrication du Saké, la manière de s’asseoir dans le bar en fonction du nombre de clients, comment le magasin est organisé, une sociologie des clients, ce qu’on y trouve à chaque fois… La lecture est souvent interactive pour le lecteur car les dialogues et textes sont organisés à la manière d’un jeu de l’oie et il alors faut tourner le livre dans tous les sens. Il y a même des pages qui se déplient laissant voir l’intérieur du magasin comme si on y était…
Il y en a pour tous les goûts dans ce petit carnet de voyage particulier, proche du quotidien des japonais. J’y ai apprécié cette vision personnelle et humoristique propre à Florent Chavouet, et très éloignée d’une visite très touristique. A défaut de me faire aimer le saké, il a su m’y intéresser et me faire voyager le temps d’un livre.
Petites coupures à Shioguni, Florent Chavouet, éditions Picquier
Menu Japon contemporain – Catégorie Tokyo by night

Résumé : Kenji avait emprunté de l’argent à des gens qui n’étaient pas une banque pour ouvrir un restaurant qui n’avait pas de clients. Forcément, quand les prêteurs sont revenus, c’était pas pour goûter les plats.
Mon avis : Entre roman graphique et roman policier, Petites Coupures à Shioguni nous entraîne dans une histoire de Yakuzas qui pourchassent un cuistot…ou une jeune fille qui a piqué un blouson… ou un employé de fournisseurs en distributeurs automatiques qui veut se venger… mais est-ce que les yakuzas en sont vraiment ? Bref, vous l’aurez compris, l’intrigue est complexe !
Car le livre est organisé comme si le lecteur était le policier chargé de l’enquête : il interroge les suspects et témoins et l’histoire évolue en fonction de leurs versions. L’intrigue est donc non linéaire, entrecoupée de notes de polices au stylo sur des supports parfois étranges, et avec des retours en arrière fréquent en fonction de qui raconte sa version de l’histoire.
L’auteur nous propose une chevauchée nocturne dans un quartier ordinaire avec des sujets qu’il affectionne : les petits restaurants bon marchés, les postes de police de proximité, les rues encombrées de câbles électriques et de divers objets, les véhicules japonais…
J’ai trouvé que l’histoire était pleine de suspense et de rebondissements, même si je n’ai pas saisi un élément dans le dénouement au sujet de la jeune fille au blouson. Le dénouement est totalement inattendu et invite à relire une deuxième fois l’album, non pas vis à vis d’une incompréhension, mais pour mieux saisir les réels enjeux de l’ensemble des personnages. Car tout le monde ne dit pas la vérité…
Quant au dessin, on retrouve tout le style de Florent Chavouet évoqué plus haut avec Touiller le miso : des plans larges sur le quartier, des gros plans sur des personnages, des descriptions détaillées de lieux comme la cuisine du restaurant, des scènes en deux ou quatre cases avec des dialogues posés ça et là comme écrits au stylo. L’ambiance est sombre dans le ton, mais aussi dans les couleurs car toute l’histoire a lieu de nuit. Les teintes sont tantôt criardes comme passées au néon, tantôt vertes ou bleues comme si on voyait les personnages faiblement éclairés tout droit sortis de l’obscurité.
Un roman graphique qui sort de l’ordinaire et donne envie de lire d’autres histoires du même auteur !
Tokyo Sanpo, Florent Chavouet, éditions Picquier
Menu Japon contemporain – Catégorie Tokyo by night

Résumé : » Il paraît que Tokyo est la plus belle des villes moches du monde. Plus qu’un guide, voici un livre d’aventures au cœur des quartiers de Tokyo. Pendant ces six mois passés à tenter de comprendre un peu ce qui m’entourait, je suis resté malgré tout un touriste. Avec cette impression persistante d’essayer de rattraper tout ce que je ne sais pas et cette manie de coller des étiquettes de fruits partout, parce que je ne comprends pas ce qui est écrit dessus. A mon retour en France, on m’a demandé si c’était bien, la Chine. Ce à quoi j’ai répondu que les Japonais, en tout cas, y étaient très accueillants. «
Mon avis : Tokyo Sanpo est un guide de voyage très personnel réalisé entièrement au crayon de couleur et nous faisant visiter le quotidien de son auteur pendant ses 6 mois passés à Tokyo, à pied et en vélo.
Il se découpe en plusieurs chapitres, commençant à chaque fois par un plan très détaillé du quartier visité et des lieux dessinés par Florent signalé par des numéros qui correspondent aux pages du guide. Chaque quartier a ses particularités et son poste de police de proximité, représenté à chaque fois de façon humoristique. On apprendra d’ailleurs qu’en tant qu’étranger il a souvent été arrêté par « racisme » japonais ou pour des histoires de vélo « volé ». Il se venge gentiment sur une page dédiée à une petite « sociologie facile » des policiers japonais, avec des représentations à mourir de rire.
Que dire sur ce guide ? Je l’ai trouvé tout simplement extraordinaire, car contrairement aux autres guides dits « touristiques », il nous propose des éléments du quotidien aussi simples que la représentation des immeubles, des publicités, des étiquettes de fruit ou une sociologue des gens qui habitent le quartier. On plonge littéralement dans le quotidien des japonais, du point de vue d’un expatrié, avec ses questions sur la culture.
Au niveau dessin, le style de Florent Chavouet évolue selon le sujet : tantôt des représentations détaillées d’un élément architectural similaire à de la photographie au crayon de couleur, tantôt des pages d’anecdotes dessinées de façon plus simple et humoristique, voire caricaturales pour nous raconter une histoire de son quotidien. On retrouve aussi des intérieurs complets de maisons qu’il a habité avec des détails amusants. Les plans de quartiers vus de haut sont époustouflants de détails, même s’ils sont parfois fantaisistes.
C’est un guide à feuilleter pour picorer quelques éléments graphiques ou anecdotes du quotidien de l’auteur, ou à lire d’une traite pour vivre avec lui ces 6 mois passés au pays du Soleil Levant.
Le guide date de 2009, donc pas sûr de retrouver l’intégralité de certains lieux représentés si jamais vous allez au Japon et que vous souhaitez marcher sur les pas de Florent Chavouet, même si cela serait intéressant à réaliser.
J’ai personnellement beaucoup apprécié la ballade, surtout à une période où il ne m’est pas possible de voyager.
Et vous ? Où en êtes-vous dans ce challenge ?
Est-ce que nous avons des livres en commun? Avez-vous lu l’un des livres que je viens de vous présenter ?
Dites-moi tout en commentaire. 🙂
Saké et matcha,
A.Chatterton
Il faut vraiment que j’écrive un premier recap de mes lectures.. Je comptais le faire par menu. Comme j’ai mis mon compte insta en pause en plus c’est mon seul moyen de communiquer sur le challenge 😅
En tout cas tes lectures sont très intéressantes !! Merci pour ces découvertes 🙂
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De rien 😉, t’as qu’à faire des mini chroniques. Ça va plus vite. 😁
Moi j’attends ton retour sur le projet ombre avec le bilan des points avec impatience 🥳
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C’est ce que je vais faire de toute façon !
Le prochain bilan c’est pour début juillet donc tu as le temps xD Il couvrira avril, mai et juin + le rattrapage de celles et ceux qui étaient en retard pour certaines chroniques..
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Je suis trop impatiente 😁🥳
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Je découvre Petites coupures à Shioguni et je suis fan du concept. J’espère y mettre la patte dessus à la médiathèque.
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N’hésite pas 😉
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